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Le refactoring qui fait mal (symptôme expliqué par la psychologie du code)

Temps de lecture : 5 min


Cet article fait partie d'une série explorant les symptômes naturels apparaissant au sein d'une équipe technique qui collabore au développement – principalement informatique – d'un produit. On y explore le lien avec des modèles issus de la psychologie du code, travaillée dans notre programme d'accompagnement du même nom.

Le diagnostic

Le symptôme du refactoring qui fait mal s'exprime souvent dans une situation du type : « Michel vient de soumettre une PR qui réécrit du code que j'ai pushé il y a quelques jours, sans qu'on en parle avant, et ça me met en rage."1

À l'origine de l'apparition de ce symptôme, il y a plusieurs facteurs,2 mais surtout un majeur : l'identification. Il s'agit de la confusion inconsciente que je vais entretenir entre qui je suis et ce que je fais.

Lorsque j'y suis soumis, je vais par exemple m'identifier au code que j'écris3. Et ainsi, lorsque quelqu'un y touche et le remet en question, par exemple à l'occasion d'un refactoring, je vais le prendre pour moi, je vais considérer ça comme une remise en question de la personne que je suis et de mes qualités. Je vais entrer en réaction inconsciente par rapport à ça. Alors même qu'il y a probablement de très bonnes raisons pour lesquelles il était bien de ré-écrire ce code.

Un modèle à la rescousse

Pour bien comprendre l'identification, nous pouvons parler du modèle4 des niveaux neuro-logiques de la pensée, introduit par Robert Dilts, qui a beaucoup fait avancer le champ de la Programmation Neuro-Linguistique, qui fournit des outils largement utilisés par les coachs professionnels – comme Etienne et moi.

Il postule que nous fonctionnons comme une pyramide :

  • elle repose sur le niveau environnement : ce sont les choses qui arrivent autour de moi, car ma façon de fonctionner dépend de l'environnement dans lequel je suis,
  • le niveau du bas de la pyramide est celui des comportements : les façons dont j'interagis avec l'environnement,
  • le niveau au-dessus est celui des compétences et capacités : les savoir-faire que je développe afin de pouvoir agir par mes comportements,
  • le niveau au-dessus est celui des valeurs et croyances : les choses que je crois et valorise et qui vont déterminer les capacités d'action que j'ai,
  • le niveau du haut de la pyramide est celui de l'identité : qui je suis au fond et comment cela conditionne les valeurs par lesquels je choisis de vivre,
  • il y a un niveau au-dessus de la pyramide, celui de l'appartenance : il correspond à quelque chose de plus grand que moi auquel je suis connecté et qui influence qui je suis.
Les niveaux neuro-logiques de la pensée de Robert Dilts

Ainsi la pyramide qui nous représente possède 4 niveaux, de haut en bas : identité (qui ?), valeurs et croyances (pour quoi ?), compétences et capacités (comment ?) et comportements (quoi ?). Elle repose sur l'environnement (où, quand, avec qui, quoi ?) et est en lien avec une appartenance (??).

Chaque niveau est un niveau logique : il est d'une nature fondamentalement différente de celui du dessous. Une manière de l'appréhender est de considérer un oiseau, qui se vit en 3 dimensions dans le ciel, par rapport à un serpent, qui vit en 2 dimensions sur le sol.

Ils sont ordonnés ainsi, car chaque niveau va principalement influencer les niveaux du dessous. Ainsi, pour changer un comportement de façon durable, il va être nécessaire de développer une nouvelle compétence ou capacité. Et si c'est bloqué à ce niveau, il peut être nécessaire de changer une croyance afin que tout se reconfigure ensuite.

S'en sortir

Ce modèle montre qu'il y a une différence fondamentale entre qui je suis et ce que je fais. C'est d'ailleurs pour ça que lorsque l'on parle d'alignement, on l'illustre parfois en disant : mettre plus de qui je suis dans ce que je fais.

Cette simple prise de conscience peut parfois suffire à m'aider à moins m'identifier. C'est un travail de longue haleine, car les vieilles habitudes ont la vie dure… Autrement – et plus scientifiquement – dit, il faut du temps et de la répétition pour tracer de nouveaux chemins neuronaux qui modifient nos façons instinctives de réagir.

Dans notre programme, nous abordons différentes stratégies pour réduire ce biais, mais on peut aussi évoquer ici le simple fait de changer de langage. Au lieu de dire « mon code », je peux commencer à essayer de dire « notre code », voire « le code ». Dans ce dernier cas, on évite au passage l'identification collective de l'équipe à une portion du code, qui pourrait causer le même symptôme vis-à-vis d'autres équipes.


  1. Comme pour tous les symptômes explorés ici, c'est quelque chose qu'on peut ressentir soi-même, ou observer chez un autre membre de l'équipe. Parfois, ça n'est pas de la rage, mais un sentiment de la même famille, plus ou moins fort : colère, tension, agacement, pétage de câble, etc. ↩︎

  2. D'autres facteurs mineurs peuvent être par exemple : le rejet de mes erreurs, la difficulté de se mettre en posture d'apprentissage ou à considérer d'autres points de vue que le mien. Ceux-ci sont aussi abordés en détail dans le programme. ↩︎

  3. Ou plus généralement, à ce que je produis : ma présentation, mon projet, mon œuvre d'art ↩︎

  4. Il s'agit d'un modèle et, à ce titre, il est nécessairement simplificateur. Mais il permet tout de même de se clarifier sur notre fonctionnement. ↩︎

Hugues

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